Source: Radio-Canada (31 juillet 2021)
MICHEL : Avez-vous déjà entendu parler du Toki Pona ? Ou, je devrais peut-être dire, avez-vous déjà parlé le Toki Pona ? Parce qu'il s'agit d'une langue, une langue inventée par notre invitée, Sonja Lang, qui est originaire de Moncton. Et il y a 20 ans, elle a voulu développer une façon universelle de communiquer, et elle a même récemment lancé un dictionnaire de Toki Pona. Sonja Lang est à Toronto… Bonjour, Sonja Lang !
SONJA : Bonjour, bonjour !
M : Le Toki Poka, ça se définit comme la "Langue du Bien", c'est ça ?
S : Exactement.
M : Vous en êtes la créatrice, de cette langue, le Toki Pona. Il faut dire d'abord que vous êtes polyglotte : combien de langues parlez-vous ?
S : Ah, euh… Ça c'est vraiment une bonne question ! On pourrait poser la question à une musicienne, demander combien d'instruments qu'une personne joue, mais je parle… Je ne sais pas, je dirais peut-être de six à neuf langues. Ça dépend à quel niveau.
M : Eh ben dis-donc… Et pourquoi avoir voulu en inventer une nouvelle ?
S : Pour moi c'était un processus interne, c'était mon effort de comprendre c'était quoi le sens de la Vie. Mais je voulais utiliser une approche minimaliste, essayer de réduire le nombre d'idées au minimum, mais avec ce minimum-là être capable d'exprimer le maximum.
M : Et vous êtes partie de quoi ? Comment on crée une langue, à partir de rien ou presque rien ?
S : Moi, je commence avec les phonèmes, les sons. Donc dans le cas du Toki Pona, je voulais une langue qui avait très peu de lettres ; et donc par exemple, les gens de différentes origines linguistiques pourraient facilement les prononcer.
M : Vous avez gardé les voyelles, mais pas toutes les consonnes.
S : Exactement, exactement ! Donc par exemple il n'y a pas la voyelle U, qui est facile pour nous les francophones, mais qui est plus difficile pour les anglophones. Et il n'y a pas le son F, qui pour nous est facile, mais peut-être pour les Coréens ou les Indonésiens, les Finnois, peut-être… ils ne peuvent pas prononcer le F, par exemple.
M : Oui, je dis vous avez gardé les voyelles, mais toutes sauf une, quand même. Vous aviez présenté, il y a de ça vingt ans, en 2001, la base du Toki Pona sur Internet. À ce moment-là, quelles avaient été les réactions ?
S : J'étais vraiment surprise ! Pour moi c'était vraiment comme un projet personnel de création, mais rapidement les gens ont adopté cette langue, et il y a des communautés qui se sont développées sur Reddit, sur Facebook, sur Discord… Et puis il y a des gens qui lancent des concours de poésie, des musiciens qui font de la musique en Toki Pona, il y a des revues illustrées en Toki Pona. Non, c'est quelque chose qui est devenu un phénomène. C'est un peu comme une plante, j'ai mis les débuts, j'ai mis la… comment on dit, la… le seed, en anglais ?
M : Vous avez semé la graine, quoi.
S : Oui, j'ai semé la graine. Mais le reste s'est développé naturellement.
M : Et est-ce que vous souhaitiez, et est-ce que vous souhaitez toujours en faire une langue universelle, je ne sais pas moi, un petit peu comme l'Espéranto ?
S : Hum, oui et non. Je pourrais dire que le Toki Pona est activement utilisé, pour communiquer entre des gens de différents pays ; dans ce sens-là oui, c'est comme l'Espéranto. Mais le Toki Pona appartient à une catégorie différente. On pourrait dire que c'est une langue plutôt philosophique, ou artistique, ou même que c'est une langue pour s'amuser. Le Toki Pona est beaucoup plus facile à apprendre que l'Espéranto, parce que ça a été conçu avec une stratégie différente. Au lieu d'apprendre par cœur des milles et des milles de différents mots pour différentes choses, le Toki Pona regarde l'expérience humaine, puis la simplifie à travers une lentille de cent trente-sept mots. Donc à partir de ces mots de base, on peut les combiner et créer des nouveaux sens, et pouvoir exprimer la totalité de l'expérience humaine. C'est ça, la vision.
M : Bah voilà ! Il faut faire quand même certains regroupements de ces mots. Vous dites : cent trente-sept mots dits "essentiels", mais au début si j'ai bien compris il y en avait, quoi, cent vingt-trois, un petit peu moins ?
S : Oui, exactement. Il y en avait cent vingt, ou cent vingt-trois, au début. Mais la communauté a ajouté leurs propres mots. Et puis il y en a, de ces mots-là, qui sont devenus populaires, il y en a qui sont devenus peut-être "pas populaires". Mais c'est un processus naturel, qu'une langue évolue.
M : Sonja Lang, au début vous avez dit : "il y a des voyelles qu'on n'utilise pas, des consonnes également", mais faut dire que le Toki Pona emprunte de plusieurs langues, dont le Français Acadien, n'est-ce pas ?
S : Oui, j'ai glissé quelques mots acadiens pour donner une petite "épice" de mes origines…
M : Par exemple ?
S : Par exemple, il y a un mot général pour les insectes et les araignées, qui vient du mot "bibitte". Il y a aussi un mot pour le derrière de quelque chose, qui vient d'un mot très familier qu'on utilise en Français Acadien, que je ne dirais pas tout fort à la radio, mais c'est un peu drôle de savoir…
M : Le "derrière" de quelque chose, je pense savoir ce que c'est, je ne le prononcerai pas non plus mais je pense qu'on comprend.
S : Et puis c'est… Pour moi, c'est drôle de savoir qu'il y a des gens en Russie, ou au Brésil, qui se parlent entre eux en utilisant des mots acadiens.
M : Ha ha, oui ! Sans le savoir, mais quand même, oui, ça fait voyager certains mots. Le nombre de mots de base est limité, mais… c'est ça, c'est l'association des mots qui permet davantage de possibilités. Est-ce que c'est une façon de l'expliquer ?
S : Oui, exactement. Et puis chacun des mots de base a été choisi avec soin, pour couvrir une variété de différentes significations. C'est un peu comme des cubes, dans un jeu de construction basé sur les différents archétypes universels. Et puis si vous voulez, je peux vous donner quelques exemples.
M : Absolument !
S : Par exemple, je pourrais dire qu'une amie, c'est une personne bonne, "jan pona". Je pourrais dire que l'iPad, c'est un appareil d'informations plat. Je pourrais dire qu'un chat ou un chien, c'est un animal de maison, "soweli tomo". C'est en combinant des mots comme ça qu'on peut s'exprimer.
M : J'ai vu aussi que "ordinateur" devient un "appareil pour des photos de chat", et quiconque est abonné à Facebook comprendra. Un appareil pour des photos de chat ?
S : Oui. Et une partie du processus de collection pour ce dictionnaire… C'est pas un dictionnaire prescriptif, c'est pas moi qui dit aux gens ce qui est correct, ce qui est une erreur, mais j'ai fait une consultation avec la communauté ; parce qu'on a des milliers de personnes, de locuteurs, de "tokiponophones" si vous les appelez ainsi. Et puis c'est une réponse qui est revenue […] pour le mot ordinateur. Et donc ça reflète la réalité subjective. C'est quoi, l'ordinateur, en ce moment ?
M : Parlons-en, Sonja Lang, de ce dictionnaire que vous avez lancé, corrigez-moi si je me trompe, un peu plus tôt cette année. C'était en 2021 ?
S : Oui ! Il y a, je pense, treize jours. C'est vraiment récent. Vous êtes les premiers à catcher la nouvelle.
M : Et votre dictionnaire, il est devenu numéro un dans sa catégorie, sur Amazon !
S : Oui, c'est surprenant ! Parce qu'on fait compétition contre des dictionnaires espagnols, arabes, et cetera, mais le Toki Pona Dictionary est devenu "number one new release", dans la catégorie des dictionnaires, exactement, sur Amazon.
M : Donc ça veut dire qu'il y en a, vous avez dit comment ? Des "tokiponophones", des usagers de la langue. Il y en a partout dans le Monde, il doit y en avoir un certain nombre, aussi ?
S : Oui ! C'est un peu difficile de calculer exactement combien de personnes parlent la langue, mais selon nos groupes, nos communautés les plus grandes sont… Il y a à peu près sept mille, cinq mille, quatre mille membres, dans les plus grandes communautés sur Internet. Et si on pense à ces chiffres-là, on peut dire que le Toki Pona est devenu plus populaire que les langues comme le Klingon, qui a été inventé pour Star Trek, ou bien les langues des elfes, qui avaient été inventées par Tolkien pour Le Seigneur des Anneaux.
M : C'est quand même quelque chose ! C'est pas rien !
S : Ah, c'est intéressant, c'est… C'est bon à savoir que j'ai pas besoin de… C'est un phénomène qui a été démarré par moi, mais moi je peux être présente ou je peux faire d'autres choses, et la langue continue à s'épanouir et à grandir comme une plante.
M : Oui oui, et puis vous l'avez dit, votre dictionnaire, j'ai aimé votre façon de le décrire. C'est pas prescriptif, vous ne dites pas "oui, il faut parler comme ça", "non ça c'est pas bien", il y a toute la notion de… C'est quoi, c'est ludique ? On aime bien s'amuser avec le Toki Pona.
S : Exactement, oui. Et il y a beaucoup de gens pour qui c'est un jeu. En ce moment il y a un petit groupe qui travaille sur la traduction officielle du Toki Pona pour le jeu Minecraft, et donc il y a une version update qui va venir bientôt, où le Toki Pona sera une option dans le jeu.
M : Minecraft, vous allez à l'échangée des jeunes !
S : Oui, c'est vraiment surprenant, et puis je dirais même que c'est les jeunes qui ont poussé la langue à des nouveaux sommets, en terme d'éloquence.
M : On parle de jeu… Sonja Lang, j'ai lu en faisant la recherche, que vous traversiez une période difficile il y a une vingtaine d'années, au moment de créer le Toki Pona. Une phase dépressive. Est-ce qu'il y avait un lien entre votre état de santé à l'époque et la création du Toki Pona ?
S : Je dirais que oui. Je dirais que c'est quelque chose d'assez commun pour beaucoup d'artistes, pour qui la création de quelque chose de nouveau devient une sorte de thérapie. Donc oui, oui c'est vrai.
M : Parce que le Toki Pona souhaite éliminer les notions négatives, la confusion dans le langage.
S : Oui, c'est un peu comme la pensée latérale, ça aide à encadrer la pensée d'une manière plus simple, plus positive. Donc ça donne des nouvelles perspectives, des nouvelles manières de voir les choses. Et donc pour moi c'était un processus personnel, mais une fois qu'une langue est devenue une langue de la communauté… Ça devient quelque chose de plus grand que ses origines.
M : Vous le reconnaissez, c'est une langue, le Toki Pona, qui a quand même ses limites. Par exemple, si on aborde des thèmes précis, les sciences, par exemple la technologie. Le Toki Pona risque de ne pas suffir, ou du moins de ne pas être assez précis.
S : C'est vrai, c'est vrai ! Et puis c'est une langue qui dépend beaucoup du contexte immédiat. Et je vais prendre la comparaison avec l'impressionnisme : il y a des toiles qu'on peut regarder à une certaine distance, et on voit que c'est pas mal vague et flou, mais en utilisant des touches du pinceau large on peut quand même brosser un tableau qui devient clair, dans un certain contexte. Et donc, c'est un peu comme ça que j'explique ça.
M : J'ai vu également qu'il y avait une chorale en Allemagne qui a inclus le Toki Pona à son répertoire, aux côtés d'autres langues inventées comme l'Espéranto — qui a été créé en quoi, 1880 ? — et le Klingon, la langue de Star Trek. C'est vrai, ça ? On chante en Toki Pona ?
S : Ouaouh ! Ça, vous m'apprenez des nouvelles choses ! La communauté est tellement grande que je ne connais pas tout le monde, donc ça je ne le savais mais, mais c'est intéressant ! Il faudrait que j'aille examiner ça !
M : Ouais, ouais ! À Stuttgart, je pense, que j'ai lu qu'une chorale a intégré au moins un petit bout de Toki Pona. Est-ce que vous voyez un grand avenir, une utilisation à grande échelle pour le Toki Pona, parce qu'il y a des gens quand même, là, mais est-ce que c'est une langue qui est appelée à prendre de l'expansion, encore ?
S : C'est vraiment une bonne question. J'ai pas d'ambition, comme ma philosophie est un peu de laisser les choses se développer naturellement, c'est plus comme ça que je vois les choses, j'essaie pas de contrôler, ou de donner une vision de comment la langue devrait être utilisée. Je laisse tout simplement les gens l'explorer, s'amuser, puis développer leur propre… Il y a des gens qui publient des livres, il y a des gens qui font de la musique… Je laisse ça se développer naturellement. C'est un peu ma philosophie.
M : Vous l'avez dit, c'est un peu comme une plante. On sème, mais ensuite on attend de voir le résultat. Sonja Lang, on peut faire sa recherche : "Toki Pona", en deux mots. Avant de terminer, si je vous demandait comment on dit "merci d'avoir été des nôtres", Sonja Lang ?
S : Hum, la manière la plus rapide, ça serait tout simplement : "sina pona", ça veut dire "vous êtes bonne". sina pona.
M : Oh, bah "sina pona" ! On apprend déjà, c'est assez simple. Sur Amazon, donc, pour votre dictionnaire, est-ce qu'il y a d'autres façons de se le procurer pour l'instant ?
S : En ce moment, c'est seulement sur Amazon, mais on va faire une distribution plus grande à l'avenir, probablement. Mais pour l'instant c'est amazon.ca pour les auditeurs au Canada.
M : Bah il nous reste à vous souhaiter la meilleure des chances que le Toki Pona se promène partout dans le Monde. Et surtout il nous reste à vous remercier, Sonja Lang, originaire de Moncton mais installée depuis environ un an à Toronto. Merci beaucoup !
S : Merci beaucoup, au plaisir de parler avec vous autres !
Source: Radio-Canada (July 31, 2021), translated from French
MICHEL: Have you ever heard about Toki Pona? Or maybe I should say, have you ever spoken in Toki Pona? Because we're talking about a language, a language invented by our guest, Sonja Lang, who is originally from Moncton. And 20 years ago, she wanted to develop a universal way to communicate, and she even recently launched a Toki Pona dictionary. Sonja Lang is in Toronto… Hello, Sonja Lang!
SONJA: Hello, hello!
M: Toki Pona is defined as the "Language of Good", is that right?
S: Exactly.
M: You're the creator of this language, Toki Pona. We should first mention that you're a polyglot: how many languages do you speak?
S: Ah, uhm… That's a really good question! You could ask the question to a musician, and ask how many instruments a person plays, but I speak… I don't know, I would maybe say six to nine languages. It depends at what level.
M: Oh my goodness… And why the desire to invent a new one?
S: For me, it was an internal process. It was my effort to understand what is the meaning of life. But I wanted to use a minimalist approach, to try to reduce the number of ideas to a minimum, yet with that minimum be able to express the maximum.
M: And what did you start with? How does one create a language, from scratch or almost from scratch?
S: I start with the phonemes, the sounds. So in the case of Toki Pona, I wanted a language that had very few letters, so for example people from different language backgrounds could easily pronounce them.
M: You kept the vowels but not all the consonants.
S: Exactly, exactly! So for example there isn't the [French] vowel "u", which is easy for us French speakers, but which is harder for English speakers. And there isn't the sound F, which for us is easy, but maybe for Koreans or Indonesians or Finns maybe… they can't pronounce F, for example.
M: Yes, I say you kept the vowels, but all of them except one, actually. You presented, this was twenty years ago, in 2001, the fundamentals of Toki Pona on the Internet. At that time, what were the reactions?
S: I was really surprised! For me, it really was like a personal creative project, but quickly people have adopted this language, and communities developped on Reddit, Facebook, Discord… And then there are people launching poetry contests, musicians making music in Toki Pona, there are illustrated magazines in Toki Pona. No, it's something that became a phenomenon. It's a bit like a plant, I put the beginnings, I put the… how should I say, the… "seed", in English?
M: You planted the seed, yeah.
S: Yes, I planted the seed. But the rest developped organically.
M: And did you want and do you still want to make it a universal language, I don’t know, a bit like Esperanto?
S: Hmm, yes and no. I could say that Toki Pona is actively used for communication between people from different countries; in that sense, yes, it's like Esperanto. But Toki Pona belongs to a different category. You could say that it's more of a philosophical or artistic language or even a recreational language. Toki Pona is a lot easier to learn than Esperanto, because it was designed with a different strategy. Instead of memorizing thousands and thousands of different words for different things, Toki Pona looks at the human experience, and simplifies it through a lens of 137 words. So from those base words, you can combine them and create new meanings and can express the totality of the human experience. That's the vision.
M: Oh, I see! You still have to make certain combinations with these words. You say: 137 words called "essential", but in the beginning, if I understand correctly, there were, what, 123, a bit fewer?
S: Yes, exactly. There were 120 or 123 in the beginning. But the community has added their own words. And some of those words have become popular, and some of them have become maybe not popular. But it's a natural process that a language evolves.
M: Sonja Lang, in the beginning you said, "there are vowels that are not used, and consonants too", but it should be said that Toki Pona borrows from many languages, including Acadian French, is that right?
S: Yes, I slipped in a few Acadian words to give a bit of spice from my roots…
M: For example?
S: For example, there is a general word for insects and spiders that comes from the word "bibitte". And there's also a word for the rear part of something, which comes from a very informal word we use in Acadian French, which I won't say out loud on the radio, but it's a bit funny to know…
M: The "rear part" of something, I think I know what it is, I won't pronounce it either, but I think we understand.
S: And it's… For me, it's funny to know that there's people in Russia or in Brazil talking to each other with Acadian words.
M: Ha ha, yes! Without knowing, but still, yes, certain words get to travel. The number of basic words is limited, but… that's it, it's combining words that allows more possibilities. Is that a way to explain it?
S: Yes, exactly. And each of the basic words was carefully chosen to cover a variety of different meanings. It's a bit like the blocks in a building game based on different universal archetypes. And if you want, I can give you a few examples.
M: Absolutely!
S: For example, I could say that a friend is a "good person" (jan pona). I could say that an iPad is a "flat information device". I could say that a cat or dog is a "house animal" (soweli tomo). It's by combining words in this way that you can express yourself.
M: I've also seen that "computer" becomes "device for cat pictures", and anyone who uses Facebook will understand. A device for cat pictures?
S: Yes. And a part of the collection process for this dictionary… It's not a prescriptive dictionary, I'm not telling people what is correct or an error, but I made consultations with the community; because we have thousands of people, of Toki Pona speakers. And it's an answer that came up […] for the word "computer". And so it reflects subjective reality. What is a computer in this very moment?
M: Sonja Lang, let's talk about this dictionary you launched, correct me if I'm wrong, earlier this year. It was in 2021?
S: Yes! It was, I think, 13 days ago. It's very recent. You are the first ones to catch the news.
M: And your dictionary has become number one in its category on Amazon!
S: Yes, it's surprising! Because we're competing with Spanish and Arabic dictionaries, etc. But Toki Pona Dictionary has become the "number one new release" in the dictionary category, exactly, on Amazon.
M: So that means that there are, how did you call them, Toki Pona speakers or Toki Pona users, they are throughout the world, there must be quite a number of them, also?
S: Yes! It's a bit difficult to calculate exactly how many people speak the language, but according to our largest groups and communities, there are about 7,000 and 5,000 and 4,000 members in the largest online communities. And if we consider these figures, we can say that Toki Pona has become more popular than languages such as Klingon, which was invented for Star Trek, or the elf languages, which were invented by Tolkien for the Lord of the Rings.
M: That's quite something! It's no small achievement!
S: Ah, it's interesting, it's… It's good to know that I don't have to… It's a phenomenon that I started off, but I can be present or do other things, and the language continues to blossom and grow like a plant.
M: Yes yes, and you've said that your dictionary, I liked your way of describing it. It's not prescriptive. You don't say, "Yes, you must speak like this", "No, that's wrong." There's this whole notion of… What is it, it's playful? People enjoy playing with Toki Pona.
S: Exactly, yes. And there are many people for whom it is play. Currently, there's a small group working on the official Toki Pona translation for the game Minecraft, and so there's a version, an update that will come soon, where Toki Pona will be an option in the game.
M: Minecraft, change is happening among the youth!
S: Yes, it's really surprising, and I would even say that it's the youth who pushed the language to new heights in terms of eloquence.
M: We're talking about gaming… Sonja Lang, I read while I was doing research that you were going through a difficult period about twenty years ago, at the time when you created Toki Pona. A depressive phase. Was there any link between your health status of the time and the creation of Toki Pona?
S: I would say yes. I would say that it's something quite common for many artists, for whom creating something new becomes a sort of therapy. So yes, yes it's true.
M: Because Toki Pona aims to eliminate negative concepts and confusion from the language.
S: Yes, it's a bit like lateral thinking. It helps to frame your thoughts in a simpler and more positive manner. So it gives new angles, new ways to see things. And so for me it was a personal process, but once the language became a community language… it becomes something greater than its origins.
M: You acknowledge that Toki Pona is a language that still has its limits. For example, if we broach detailed topics, like science and technology. Toki Pona risks being insufficient or at least not being precise enough.
S: It's true, it's true! And it's a language that depends a lot on the immediate context. And I'll make a comparison with impressionism: There are paintings you can look at from a certain distance, and you see that it's relatively vague or blurry, but by using broad brushstrokes you can still paint a picture that becomes clear in a certain context. And so, that's a bit how I explain it.
M: I also saw that there's a choir in Germany that included Toki Pona in its repertoire, alongside other constructed languages like Esperanto — that was created in what, 1880? — and Klingon, the Star Trek language. That's true, isn't it? People sing in Toki Pona?
S: Wow! You're teaching me new things! The community is so large that I don't know everyone, so I didn't know that, but it's interesting! I'll have to go check it out!
M: Yeah, yeah! In Stuttgart, I think, I read that a choir included at least a bit of Toki Pona. Do you foresee a great future and large-scale use of Toki Pona, because there's quite a few people already, but is it a language that's destined to keep expanding, still?
S: That's a really good question. I have no ambitions, like, my philosophy is basically to let things develop organically. That's more how I see things. I don't try to control or to give a vision of how the language should be used. I simply let people explore it, enjoy themselves, and develop their own… There's people publishing books, people making music… I let it develop organically. That's pretty much my philosophy.
M: Like you said, it's a bit like a plant. You plant the seed, but then you wait to see the results. You can look up Sonja Lang and "Toki Pona", spelled in two words. Before ending, could I ask you how to say "thank you for joining us", Sonja Lang?
S: Hmm, the fastest way would be simply: "sina pona". It means "you are good". sina pona.
M: Oh, there, sina pona! We're already learning, it's quite simple. So on Amazon for your dictionary. Are there other ways to obtain it at the moment?
S: At the moment, it's only on Amazon, but we will do a broader distribution in the future, probably. But for now, it's amazon.ca for listeners in Canada.
M: Well, I'll end by wishing you the best of luck that Toki Pona spreads throughout the world. And especially I must thank you, Sonja Lang, originally from Moncton but settled for almost a year in Toronto. Thank you very much!
S: Thank you very much, a pleasure to talk with you!